Le bourg de Chantérac, 607 habitants, se situe àtrente kilomètres à l'ouest de Périgueux, et s'étale sur une superficie de 1 900 hectares.
Il est
arrosé par trois ruisseaux aux noms évocateurs, la Beauronne, le Salembre et le Roueix. Ces deux derniers doivent leur appellation à l'ancestrale pratique du rouissage du lin et du chanvre.
Pour ce qui est de l'origine du nom de Chantérac, il s'agit d'un nom gallo-romain associant : Canterius + acum = Cantariacum,
correspondant vraisemblablement à un nom de personne ou même à un surnom. Cantairac… Chantairac d'où Chantairac en, 1104 et Chanteyrac en 1414 ….
Au cœur du bourg se dresse, imposante, telle une forteresse, l'église St Pierre ès Liens. Bien assise sur 30 m de long et 18 m de large, elle s'élève à 11 m de hauteur sous clé de voûte.
Elle est classée monument historique depuis 1914.
On ne peut s'empêcher de se poser la question de l'importance d'une telle église dans un si petit village ?
Or, on sait que depuis le X° siècle, le diocèse de Périgueux est divisé en quinze archiprêtrés et que la division en deux évêchés
(Périgueux et Sarlat) ne date que du début du XII° siècle.
Parmi ces quinze archiprêtrés, en huitième position vient l'archiprêtré
de CHANTEYRAC qui se compose de seize paroisses :
Chanteyrac,
St Aquilin, St Jean d'Ataux, Beauronne et Faye, Douzillac, St Germain du Salembre, St Médard de Dronne, St Pardoux de Dronne,
Douchapt, Segonzac, Tocane, St Etienne, St Louis et St Astier.
On peut dès lors mieux envisager l'importance de ce bourg il y a quelque dix siècles.
Cette notion de prééminence de Chantérac sur d'importants villages voisins tels que Saint Astier, se retrouve encore dans un ouvrage majeur pour l'histoire de notre province : "Le Périgord illustré" de l'Abbé Audierne qui, en 1851, parlant du château de Saint Astier, le qualifie «d'ancienne dépendance de la seigneurie de Chantérac» aux mains des La Porte en 1409.
L'important bourg de Neuvic sur l'Isle, qui par sa signification topographique de «ville nouvelle», c'est-à-dire n'apparaissant qu'au
début du second millénaire, est encore un argument pour dessiner une géographie bien différente.
Enfin, quand on apprend avec Léon DESSALLES [Histoire du Périgord, 1883] que «primitivement les archiprêtrés furent établis dans
l'étendue respective des Centaines» et que ces Centaines correspondaient à une subdivision du pays mise en place, avec un rôle de
police, entre les VI° et IX° siècles, il apparaît clairement le rôle important qu'a pu jouer avant la fin du premier millénaire un bourg comme Chantérac.
Chantérac, qui, dès les premiers siècles de notre ère, comprend au moins deux importantes villas gallo-romaines, a connu un développement
et une influence importante à la période mérovingienne et jusqu'au Moyen Âge, voire le XVI° siècle, date de l'agrandissement de son église.
La perte d'influence, au profit de voies de communication plus accessibles représenté par Ribérac au nord, la vallée de la Beauronne à l'est
et la vallée de l'Isle au sud, réduira progressivement le village de Chantérac à l'aspect que nous lui connaissons.
REMONTONS UN PEU DANS L'HISTOIRE DE NOTRE ÉGLISE.
On connaît l'existence d'un édifice religieux à Chantérac depuis le IX° siècle
(la destruction des archives durant la dernière Guerre mondiale nous empêche de remonter plus loin dans le temps).
Vraisemblablement au IX° siècle, et cela depuis l'époque mérovingienne, il existait un monastère fortifié ; ceci permettait à l'époque, avec
les nombreux cluseaux disséminés dans la commune, de se défendre contre les invasions barbares qui sont remontées, plusieurs fois,
piller l'abbaye de Chancelade et celle de Périgueux.
Nous savons qu'une nappe phréatique alimentait une source située dans cette forteresse et permettait à la population un
approvisionnement en cas de siège.
Actuellement masquée, cette source serait-elle située dans l'église ?
Certains ont écrit :
«Il existe dans l'église un puits destiné aux baptêmes ou à la défense du lieu».
Sans doute, ce monastère fut en partie détruit par des combats importants car en 1104, l'édifice est connu en tant qu'église. Il s'agit toujours d'un édifice fortifié non couvert avec ses meurtrières sur le mur sud qui traduit bien le style de construction.
Dans le chœur, on remarque la trace de deux portes en vis à vis sur les murs Nord et Sud qui ont sans doute été obturées lors de l'agrandissement de l'église au XVIe siècle.
En 1337, les Anglais déclarent la guerre à la France et commence la guerre de Cent ans.
Un des combats se déroulera dans l'église de Chantérac, or verser le sang par les armes dans un établissement religieux consacré, était considéré comme un crime. Les responsables furent condamnés à mort et l'église souillée redevint un lieu saint grâce à la "charte d'absolution" rédigée pour elle.
En 1427, absolution donnée par l'official de Périgueux, vicaire général de l'évêque absent, à Jean de Chabans et autres qui avaient repris sur les Anglais l'église de Chantérac. (Fond Lespine)
Vers le milieu du XVI° siècle, l'église est pourvue d'une belle cloche avec une inscription en caractères gothiques et un décor de semis de roses. Elle fait 1 m 20 de diamètre et 1 m 10 de hauteur. Elle est en bronze.
En 1562, débutent les guerres de religions dont l'église de Chantérac eut à souffrir. C'est certainement pour cette raison qu'elle fut
agrandie et rénovée.
"Extrait des notes archéologiques touchant l'église de Chantérac " par le Dr Ladevi-Roche (Licencié-es-sciences).
PRÉSENTATION DE L'ÉDIFICE.
L'église présente la particularité d'être dotée d'une double nef : la première datée du XII° siècle,
doublée au Nord, par un second vaisseau édifié au XVI° siècle.
On retrouve cette disposition dans plusieurs églises de Dordogne, notamment à Saint Michel
de Montaigne mais aussi dans l'ancienne église de Trélissac.
Les deux vaisseaux, ainsi réunis, furent voûtés d'ogives dont les moulures retombent sur des piliers torsadés (rappelant les dispositions de l'ancienne église de Trélissac, édifiée au début du
XV° siècle et de l'église de Rouffignac, reconstruite au XVI° siècle).
Des baies en lancettes, dotées pour certaines de remplage, furent ménagées dans le nouvel édifice
mais aussi dans la partie plus ancienne où elles cohabitent avec les baies en meurtrières.
EXTÉRIEUR :
Certains ont voulu décrire l'origine romaine de la base d'une partie des murs.
L'édifice est soutenu par des contreforts tout le tour.
Le toit est recouvert de tuiles canal.
La partie du XII° se distingue nettement de la partie XVI° car elle a conservé les meurtrières.
Au point de vue de la maçonnerie, on remarque deux types de calcaire : calcaire blond dans la partie XII° siècle et calcaire gris et gréseux (calcaire de St Astier).
Ces pierres ont subi une forte érosion (façade).
Le clocher est une tour de guerre du XIIème s.
L'entrée de l'église est défendue par quelques mâchicoulis.
INTÉRIEUR :
L'église de Chantérac est formée au moyen d'une ancienne église romane doublée d'une église gothique.
L'église romane est du XII°
siècle et l'église gothique du XVIème.
Lors de la reprise du bâtiment au XVI° siècle, on construisit une seconde nef identique à la première de par ses dimensions, doublant
ainsi la largeur de l'église. La voûte romane a disparu vraisemblablement à cette époque.
En même temps, l'église est voûtée à nouveau
de type gothique en la divisant en 4 travées.
Les voûtes sont des croisées d'ogives avec des liernes.
Pour faire communiquer les deux nefs, l'architecte adétruit le mur de l'église romane et a taillé des piliers cannelés et des piliers torses dans l'épaisseur des anciens murs.
Nous trouvons deux types de maçonnerie (pierre de taille et moellons).
Les 11 ouvertures sont de style gothique.
En 1970, les vitraux ont été restaurés.
Sur un des vitraux, nous retrouvons le Blason de la famille La Cropte de Chanterac d'azur à la bande d'or accompagnée de deux fleurs de lys de la même couleur, une en chef et une en pointe, blason que nous retrouverons dans la litre funéraire.
Les deux chœurs sont pourvus d'un autel du XVIII° en marbre grisâtre.
Le maître autel de style gothique est en bois décoré de dorures.
La chaire est du même style.
Face à l'autel principal, est suspendu un tableau appelé le tableau du vœu (1655) . Ce tableau votif de l'église de Chantérac est évoqué dans une lettre de 1894 adressé du 40 rue du Bac à Paris à Monsieur le Curé et cela est rapporté par l'abbé H. Brugière dans son
ouvrage sur le Périgord.
"Ce tableau suspendu au pilier qui sépare les deux nefs, parait être une bonne copie d'un tableau de maître. Les figures sont de grandeur naturelle. La Sainte Vierge, assise sur un autel tient de la main gauche l'Enfant Jésus debout à côté d'elle; de la main droite elle présente le rosaire au donateur…."
Ce tableau fut offert à l'occasion d'un pèlerinage que l'on faisait il y a environ 3 siècles.
De chaque côté de l'autel, on découvre deux
croix de malte sculptées et colorées en rouge. Ces croix indiquent que l'église est consacrée, elles symbolisent les apôtres (on doit donc
en trouver 12 disposées autour de l'église).
A environ 4 m de haut, vous pouvez observer une litre funéraire qui fait le tour de l'église.
La litre est un bandeau noir sur lequel sont
peints les écus des familles avoisinantes (seul et un seul reste lisible) celui de la famille des La Cropte de Chanterac.
L'ossature de la voûte d'ogive est à liernes et tiercerons, donnant ainsi à la voûte une allure d'étoile. Les clefs de voûte sont armoriées. (blason représentant les armes des La Cropte de Chanterac qui se lisent: "d'azur à une bande d'or accompagnée de deux fleurs de lys de même, une en chef, l'autre en pointe").
On peut admirer l'orgue qui a été construit dans la seconde moitié du 19ème siècle par un facteur inconnu. Il a été acheté par des châtelains, des paroissiens ou la commune. Ce simple instrument d'accompagnement dont la soufflerie manuelle a été pendant un certain temps actionnée par le sacristain, sommeillait depuis quelques années dans un recoin de l'église. Le curé qui n'en avait aucune utilité, proposa
alors de le vendre. Les habitants de Chantérac conscients de l'importance historique de cet orgue, s'opposèrent avec le maire, M. Marachet à cette vente.
L'orgue fut restauré en 1983. Il est, actuellement, utilisé lors des cérémonies et des concerts.
"Texte élaboré avec l'aide de Serge LARUË-CHARLUS".
Un projet de rénovation de l'église est à l'étude.
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